Neoverticales_reussir l'alchimie des générations du vin

Réussir l’alchimie entre les générations du vin

La génération Z est-elle une chance pour les vignerons?

Les jeunes Z ont presque 25 ans pour les plus âgés1. Ils arrivent sur le marché du travail. Certains rejoignent les domaines viticoles. Lorsque l’on travaille en équipe avec deux ou trois générations différentes, il faut veiller à la cohabitation ! Chaque génération a son style. Qu’apportent ces nouveaux milléniaux à l’entreprise ? Sur quelles bases construire la coopération avec leurs aînés de 10 ans ou 25 ans de plus ?

Voici quelques observations issues de ma pratique du conseil en management auprès des entreprises du vin et au contact de ces jeunes futurs chefs de d’exploitation ou responsables commerciaux et marketing lors de mes formations à l’Institut Jules Guyot ou à la Burgundy School of Wine &spirits business. 

La notion de génération représente des individus ayant un vécu commun, qui peut notamment être observé par l’âge. Côté consommation, le marketing du vin a largement scanné les premiers milléniaux dans leurs envies et leurs modes de consommation2

Au sein de la filière, les milléniaux ont d’abord pris le visage d’une tribu de joyeux geeks passionnés par le vin, devenus entrepreneurs autour de la Winetech. Désormais, les nouveaux milléniaux, la génération Z des 18- 24 ans, rejoignent les entreprises du vin pour y travailler dans les vignes, les chais, à la vente et à l’export.

Un nouveau centre de gravité pour le métier de vigneron

La jeune génération est en train d’agir sur le centre de gravité du travail. Elle s’est donnée pour priorité un meilleur équilibre de vie en refusant les mêmes rythmes de travail que ses aînés. Réussir signifie s’épanouir en combinant à la fois la sphère professionnelle et personnelle. Cette règle de vie vient interroger la notion de vocation, si chère aux vignerons. Une vocation, qui s’exerce dans le fait que l’on donne sans compter à ses vignes jusqu’à s’oublier soi-même parfois…

Travailler en brigade et avoir les manettes

On les désigne comme « digital natives », mais un point essentiel reste le besoin d’appartenir à une communauté. Les nouveaux milléniaux aiment travailler en équipe, en brigade dans laquelle les membres acceptent pleinement les règles ou bien s’en vont.

Ce qui va compter ce n’est pas le métier mais la mission qui leur est confiée au sein du domaine viticole.

Ils sont attachés à leur autonomie d’action au sein de l’entreprise : jadis les jeunes étaient là pour observer, apprendre avant d’être aux manettes… beaucoup plus tard. C’est terminé, les nouveaux milléniaux veulent agir ici et maintenant !

C’est plutôt une chance pour les entreprises du vin, à la condition de valoriser l’esprit d’équipe, de faire confiance à leur auto-organisation et de leur laisser les manettes pour certaines tâches. Tout le contraire d’un management directif avec une seule manière de voir le monde et de s’exprimer.

Le bio entre dans le socle de base des connaissances

C’est pour les jeunes d’abord un principe de vie : on constate parfois qu’il devient moins facile d’attirer des jeunes saisonniers si votre domaine ne conduit pas les vignes en bio …

C’est aussi une question d’enseignement agricole. Les futurs jeunes viticulteurs détiennent un socle de base de connaissances sur les enjeux environnementaux et sur l’agriculture biologique, que certains de leurs aînés ne se sont pas pleinement approprié.

La filière viticole bio est une filière dynamique : la production est en constante augmentation et le marché continue de se développer3. En ce sens, l’arrivée de la génération Z dans les vignobles peut contribuer à accélérer la dynamique du Bio, afin de l’intégrer dans les pratiques comme un des leviers de développement.

La prise en compte du féminin

Pour les nouveaux milléniaux, l’équité est un point fondamental. Ils sont particulièrement sensibles à toutes formes d’iniquités : dans le partage de la valeur entre agriculteurs et GD par exemple mais également dans l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. Cela les touche bien davantage que leurs aînés !

Rappelons que le monde agricole vient de loin. Il aura fallu attendre la loi d’orientation agricole de 1999 pour améliorer la protection sociale des viticultrices en créant le statut de conjointe collaboratrice. Les vigneronnes, héritières, repreneuses et viticultrices ont dû batailler et apprendre à composer avec les préjugés dans un monde du vin notoirement masculin. Elles s’expriment aujourd’hui à travers leurs labels associatifs : Women Do Wine, les Fab’bulleuses en champagne, les Vinifilles en Occitanie, les Divines en Alsace, les Alenior du vin de Bordeaux… Pour autant, alors que 50 à 60% de femmes sont promues œnologues chaque année, elles ne représentent que 30% des cheffes d’exploitation et 20% des sommelières en France, selon l’étude menée en 2019 par Vin et Société.

En cela, les nouveaux milléniaux permettent d’éclairer les inégalités qui se jouent à l’intérieur des domaines viticoles. Ils contribuent à identifier des actions concrètes pour réduire les écarts entre les hommes et les femmes du vin en termes d’accès aux responsabilités, d’égalité salariale et de conciliation des temps de vie.

Favoriser une fertilisation croisée des connaissances entre les générations

La génération Z invite les vignerons à pousser les portes entrebâillées d’un plus grand respect de l’environnement et de l’égalité professionnelle. Pour autant, ce n’est pas si simple car chaque génération fonde ses réactions sur des référentiels différents. Cette situation peut amener des incompréhensions, causer des tensions, qui s’illustrent dans des conflits intergénérationnels. On perd de l’efficacité, on se démotive.

Pour réussir l’alchimie entre les générations, il convient de permettre à chaque génération de trouver sa place. L’obsolescence des compétences s’accélère. Les savoirs ne peuvent plus se transmettre de façon unilatérale des anciens vers les plus jeunes. Les nouveaux savoirs se construiront à travers un co-apprentissage entre les différentes générations.

4 actions clés pour une meilleure coopération entre les générations du vin

• mixer les équipes en vue de valoriser l’apport des uns et des autres

• développer des occasions d’échanges pour un co-apprentissage sur les thématiques environnementales

• s’entraîner au décryptage et à la compréhension de la vision de l’autre4

• utiliser les outils numériques comme fertilisation croisée des connaissances

Les plus âgés pourront expliquer le temps long de la vigne et du vin, créer les conditions d’un l’apprentissage en dehors du net, en situation terrain.

De plus, les aînés sont souvent porteurs de la mémoire collective du domaine et de l’appellation. Ils pourront témoigner de l’évolution des pratiques, partager leurs échecs et leurs réussites. C’est aussi ce qui va permettre à la jeune génération de se projeter pour réussir.

En conclusion, la génération Z est une chance pour les vignerons à la condition de ne pas chercher à leur transmettre ses propres savoirs à tout prix, mais de s’attacher davantage à inventer ensemble les nouveaux codes du vin.

  1. La génération Z dite des nouveaux millenials est née à partir de 1995. On les appelle Z parce qu’ils sont nés après les X et les Y. Les X sont nés entre 1965 et 1980. Ce sont les enfants des baby-boomers. La génération Y, dite des millenials, est née entre 1980 et 1995.

2Vin &Société. La Génération Y et le vin – Étude Ifop, 2019

3Fédération nationale d’agriculture biologique. Produire bio en viticulture, 2021

4À titre d’illustration, l’utilisation de l’outil GOLDEN® permet comprendre et d’apprécier les mécanismes de choix individuels, les besoins spécifiques et les difficultés potentielles rencontrées.

Par Sylvie Brasquies, publié le 17 juin 2021
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Vigneron responsable : le regard d’une start up en viticulture de précision

Quand le digital contribue au développement de nouvelles compétences durables

Pour illustrer les 5 compétences durables de mon article précédent, j’ai choisi d’interviewer Benjamin Bois, le co-fondateur de DeaVerde, une start-up en agriculture de précision.

Ingénieur diplômé de Bordeaux Sciences Agro, Benjamin enseigne la viticulture à l’université de Bourgogne et mène des recherches en agro-climatologie viticole. Il a conçu avec Mario Rega l’application Notiphy.

Ce système en ligne permet au vigneron de communiquer de manière plus transparente sur les traitements phytosanitaires auprès des usagers de l’espace viticole et de limiter les expositions aux produits.

Savoir communiquer avec vos parties prenantes

Si le vigneron ne communique pas, alors il y a une perte de confiance entre les agriculteurs et les riverains. 

 « Le plus important pour nous, c’est que l’exploitant viticole puisse choisir l’information qu’il diffuse. Certains souhaitent communiquer auprès de leur personnel et d’autres de manière un peu plus large. » souligne Benjamin Bois.

« Les riverains ont peur qu’on leur cache des choses. Dans notre société, la défiance est permanente. Aujourd’hui plus que jamais, il faut avoir des outils qui permettent d’être transparent. »

Selon lui, cette transparence ne doit pas se faire à tout prix. Elle doit s’accompagner d’une information qui est maitrisée. Dans le cas contraire, elle peut donner lieu à des mauvaises interprétations.

 « Au départ l’exploitant a une démarche volontaire. Ce qui est important pour la communication, c’est qu’il va rencontrer les riverains uns après les autres, échanger avec eux pour leur expliquer pourquoi c’est nécessaire de traiter. »

Le système Notiphy permet ensuite de diffuser de l’information en temps réel. Ces informations peuvent être transmises par mail ou par SMS. Lorsqu’un traitement est annulé, le vigneron n’est plus contraint d’envoyer de nouveau un SMS pour indiquer que cette parcelle ne sera pas traitée. La solution logicielle permet d’automatiser cela.

Adopter les bons gestes numériques

L’utilisation d’un smartphone dans les vignes constitue un changement d’habitude pour les vignerons.

La start up Deaverde a d’abord conçu une Notiphy Box, composée d’un boitier lumineux émettant un signal tant que la réentrée n’a pas expiré. « Cela s’adresse à ceux qui vont pénétrer dans la parcelle la plupart du temps. On sécurise les ouvriers et les chefs d’exploitations ».

Daeverde a également développé le système Notiphy pour prévenir les gens à distance et de manière anticipée. 

« Il joue le rôle de la box mais dématérialisé. Le système en ligne prévient le destinataire en amont que l’on va traiter telle parcelle et de la date de retour possible. »

Pour que le système Notiphy fonctionne, il faut que le tractoriste joue le jeu. Il doit prévenir en temps réel depuis son smartphone que le traitement est en cours ou bien qu’il a terminé.

Agir de façon responsable

L’émergence de maladies liées à l’utilisation de produits sanitaires parmi les ouvriers ou bien les conseillers viticoles va générer de plus en plus de contentieux dans le monde viti-vinicole.

 « La MSA voit notre innovation d’un très bon œil avec un retour très positif, » souligne Benjamin Bois. « Même si les consultants et les exploitants essaient de limiter les intrants, cela reste difficile. Je ne vois pas apparaitre les variétés de vigne résistantes d’ici 5 ans ou 10 ans… et donc on aura encore besoin d’épandre des produits phyto et puis d’intervenir dans les vignes. Il est essentiel de prévenir et de communiquer sur ces activités… 

Le vigneron qui prend la décision d’équiper et de sécuriser ses parcelles est en avance sur son temps. Il est soucieux du bienêtre de tous les gens qui sont dans l’espace rural. 

En conclusion, la viticulture connectée est un levier précieux pour engager son domaine dans le développement durable. Une innovation comme Notiphy permet à chaque vigneron d’agir sur la santé de chacun et facilite le dialogue avec les parties prenantes.

Renouer avec la confiance des consommateurs et des citoyens est l’un des nouveaux défis du vigneron du XXIe siècle.

Par Sylvie Brasquies, publié le 12 Décembre 2019
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jeune viticulteur

Cinq compétences durables pour entrer dans la viticulture du XXIe siècle

Le développement durable change la donne pour le vigneron

Les vignerons en sont conscients : ils vont devoir s’adapter au dérèglement climatique, modifier leurs pratiques viticoles en questionnant l’impact sur la biodiversité, la protection phytosanitaire, la fertilisation et la gestion de l’eau.  C’est un passage obligé. De nombreux domaines viticoles l’ont compris et s’engagent dans des démarches environnementales (HVE, Terras Vitis, Bio etc…)

Le développement durable change la donne pour le vigneron. Cela implique une autre façon de penser la qualité de son vin, de conduire son vignoble, de valoriser sa production et de gérer son domaine. Comment les vignerons peuvent-ils s’y préparer ? Existe-t-il des leviers au niveau individuel pour réussir ?

S’engager dans le développement durable, c’est avant tout une démarche volontaire. Il faut avoir envie d’y aller. Se former à un référentiel, maîtriser les normes réglementaires et les bonnes pratiques environnementales pour son domaine, c’est essentiel.

Pour passer à l’action, le vigneron devra mettre en œuvre de nouvelles compétences durables : un comportement responsable, une capacité de dialogue, la volonté d’associer son équipe dans un esprit collectif, la remise en cause de son organisation pour la faire évoluer et la recherche constante de nouveaux procédés innovants.

C’est en quelque sorte son carnet de route individuel pour transformer de grandes intentions en pratiques opérationnelles et entrer dans la viticulture du 21e siècle !

Agir de façon responsable

Aujourd’hui, sous la pression des consomm’acteurs, on ne demande plus seulement au vigneron de produire un vin de qualité, mais on attend désormais de lui un comportement responsable.

Un comportement responsable n’a rien d’évident. Cela implique une autre façon de prendre ses décisions, en intégrant l’impact de ses actions sur les autres. Quelle est la conséquence de mon action pour la santé de mes salariés, pour mes voisins, sur l’environnement ?

Envoyer un mail ou un SMS 48h avant un traitement au personnel, aux prestataires susceptibles d’intervenir au vignoble ou bien encore à ses voisins, c’est un comportement responsable. A long terme, le vigneron y gagne en motivation, en image et en crédibilité.

Communiquer avec TOUTES vos parties prenantes

Jusqu’ici le vigneron prenait en compte l’avis de ses clients directs, des acheteurs (CHR,GD) des prescripteurs, des bloggeurs… Aujourd’hui, pour faire du vin, il devient nécessaire d’associer de nouveaux acteurs : les fournisseurs de bouteilles, de matières sèches… les riverains, les mairies, les intercommunalités, les offices de tourisme etc.

L’organisation de journées découvertes ou de de repas lors des vendanges est l’opportunité de créer un dialogue avec chacune de vos parties prenantes, d’identifier les sujets qui ont du sens pour elles.

Développer un style de management plus participatif

Le vigneron engagé dans une démarche durable doit réussir à embarquer toute son équipe et la responsabiliser. C’est la consulter avant de décider. C’est s’appuyer sur les idées et les suggestions de chacun pour mieux les associer à la démarche. C’est adopter un style de management plus participatif et accepter de déléguer davantage.

Associer le personnel administratif et le service client à des moments clés de la vie du domaine pendant la taille ou bien lors de la dégustation d’un vin permet d’insuffler de nouvelles idées et de favoriser la collaboration entre tous.

Savoir se réorganiser

Le vigneron doit être mesure de se réorganiser en permanence, de repenser ses processus, de changer les pratiques : isoler les chais, refaire les revêtements de sols, mettre en place une station d’épuration, mieux gérer le lavage des tracteurs, l’évacuation des déchets etc.

Au niveau humain, ce changement d’organisation peut amener à faire bouger les gens dans l’entreprise, à faire évoluer leur rôle et leurs responsabilités.

Adopter les bons gestes numériques

Depuis ces cinq dernières années, les innovations technologiques foisonnent dans le domaine viti-vinicole afin de diminuer la pénibilité des taches et de réduire les impacts de la production viti-viticole sur l’environnement. Elles ont en commun de s’appuyer sur des équipements connectés et des applications numériques.

En ce sens, même si c’est l’observation parcellaire qui guide d’abord le vigneron, il doit s’appuyer sur les bons gestes numériques pour conduire son vignoble : utiliser son smartphone dans les vignes, consulter des tableaux de bord pour prendre les bonnes décisions.

En conclusion, engager son domaine dans une démarche durable, c’est un peu comme jeter un pont de corde pour atteindre l’autre rive. Et c’est bien désormais à chaque vigneron de savoir le franchir en développant de nouvelles compétences durables. C’est entrer dans la viticulture du 21e siècle.

Par Sylvie Brasquies, publié le 12 Décembre 2019
Tous droits réservés©

 

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Innovation et développement : comment conduire le changement?

Neoverticales participera au 3e Forum Agriculture Innovation 2018 organisé par La Tribune à Bordeaux, sur le thème de l’innovation et du développement durable,

le Mercredi 21 novembre de 14h00 à 17h30

Salle plénière du Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine.

Les réglementations RSE progressent partout dans le monde. Notre filière V&S a défini ces dernières années de nouvelles orientations pour la réduction de l’usage des pesticides, pour une prise en compte du réchauffement climatique et d’un développement durable d’une viticulture de qualité.

Suite au lancement par l’Etat du dispositif national « Territoires d’innovation de grande ambition » (Tiga), la Région Nouvelle Aquitaine a été retenue pour construire un projet collectif baptisé VitiREV autour de ces thèmes environnementaux qui rejoignent des questionnements sociétaux forts et des questions économiques.

La 3e édition du Forum Agriculture Innovation, co-organisée par La Tribune et le Conseil régional de Nouvelle-Aquitaine, vise justement à contribuer à la construction collective de ce territoire d’innovation créant de la valeur, respectant l’environnement et répondant aux attentes des citoyens.

Sylvie Brasquies apportera un éclairage lors de la  2e table ronde sur « L’innovation, un pari à tenter, des pratiques à diffuser ». Elle évoquera notamment la manière de conduire le changement pour parvenir à diffuser les meilleures pratiques et à favoriser leur adoption par les viticulteurs.

Animateur: Mickael LOZANO, La Tribune de Bordeaux
Intervenants: Sylvie Brasquies (Neoverticales), Philippe Abram (KA2 communication), Gilles Allaire (INRA Toulouse)

 

Retrouvez notre intervention lors de la table ronde 

L’innovation, un pari à tenter , des pratiques à diffuser

https://www.neoverticales.com/2018/11/22/comment-entrer-dans-la-viticulture-du-21e-siecle/

 

Interview-Sylvie-Brasquies-REUSSIR-VIGNE-n°245

Interview : dépasser les difficultés de la transmission

DE L’IMPORTANCE DES RELATIONS HUMAINES POUR BIEN RÉUSSIR SA TRANSMISSION

J’ai eu le plaisir d’échanger avec Xavier Delbecque, rédacteur pour le magazine REUSSIR VIGNE sur l’importance du facteur humain pour bien réussir sa transmission dans le cadre d’un dossier spécial consacré à ce sujet (n° 245 novembre 2017 ).

J’aborde dans cet interview les éventuelles tensions familiales, les points de blocage et la manière de les surmonter.

Pour bien réussir votre transmission, je vous invite à consulter ce dossier très complet, avec des conseils et le retour d’expérience détaillée de la famille BRUN propriétaire du chateau de Lauga dans le Bordelais ou bien encore de Alain Tramier, vigneron dans le Ventoux qui a cédé ses vignes à Olivier Legranger, un jeune viticulteur désireux de construire son domaine. De fait, en viticulture, une transaction sur cinq s’effectue hors cadre familial.

Bonne lecture !

Xavier Delbecque : Quels sont les aspects qui causent le plus de difficultés lors d’une transmission d’exploitation ?

Sylvie Brasquies : »À l’heure de la passation, la préoccupation principale des dirigeants est généralement d’ordre financière. Il faut dire que c’est ce qui leur vient directement à l’esprit. C’est vrai que les aspects fiscaux et juridiques ne sont pas simples techniquement, et qu’il ne faut pas se tromper. Mais souvent, le plus difficile est pourtant ce qu’il reste à faire derrière, c’est-à-dire passer concrètement le relais à son successeur. Car c’est là qu’entrent en jeu les problèmes humains. C’est un passage compliqué pour les dirigeants, qui sont tiraillés entre la peur de perdre le contrôle et l’envie de transmettre. Mais aussi pour le repreneur qui doit trouver sa place. De plus, les difficultés humaines sont insidieuses car on n’a pas forcément conscience des tensions. Si beaucoup de personnes cherchent de l’aide sur les plans financiers et juridiques, très peu demandent conseil sur l’aspect relationnel. Culturellement, on fait cela seul. L’offre est par ailleurs peu visible. Pourtant, il est intéressant d’avoir le regard de quelqu’un d’extérieur à l’entreprise, qui peut prendre du recul et étudier seulement l’intérêt du domaine. Gérer l’aspect humain est très important, car ces tensions peuvent avoir des répercussions sur les performances et la santé de l’entreprise. »

XD : Quelles sont les situations qui favorisent ce type de problèmes ?

SB : »Chaque entreprise est différente, et il existe autant de cas que de personnalités. Mais je distingue quatre aspects qui sont systématiquement à la base des tensions. Tout d’abord celui des valeurs fondatrices, qui peuvent être en décalage avec celles du repreneur, et qui impactent la vision d’avenir. C’est le cas, par exemple, pour un nouveau dirigeant qui souhaite quitter la coopérative pour être indépendant, ou bien passer en biodynamie, ou encore ne plus travailler qu’avec la grande distribution. Il y a ensuite l’aspect communication. Les non-dits peuvent être à l’origine de nombreuses complications. Puis vient la répartition des tâches. Le dirigeant peut avoir du mal à lâcher les rênes, ou au contraire, le repreneur peut se demander s’il est prêt. Enfin, il y a la façon de manager et d’animer les équipes. L’ancienne génération se caractérise généralement par un management vertical, où tous les ordres viennent d’en haut, alors que la nouvelle a souvent expérimenté le management horizontal, qui laisse place à la concertation. »

XD : Comment peut-on aller au-devant de ces difficultés et surmonter les tensions ?

SB : »Plus on parle tôt de la transition, plus le climat sera sain et serein. Je conseille de définir en amont un plan stratégique, qui tiendra compte des aspects financiers, juridiques, fiscaux, accompagné d’un plan de management. Ce dernier doit poursuivre trois objectifs. Il s’agit premièrement d’accompagner le nouveau dirigeant. L’idée est de voir quelles sont ses compétences (technique, commerce, gestion…) et de vérifier qu’il n’y aura pas de perte de savoir-faire. Au besoin, il faudra envisager des formations, recrutements ou choisir des consultants. Pour arriver à cela, il est important que les deux parties se connaissent bien. J’utilise personnellement la méthode du test Golden, qui permet de mieux se connaître, de se développer, et d’analyser quelles sont les différences de caractère qui pourraient être source de problème. Dans un deuxième temps, il faut définir une vision à court et moyen terme pour créer un nouvel élan ensemble. Quand on arrive à le formuler clairement, c’est gagné. Pour cela, il faut se mettre autour de la table, et discuter de ce qui est souhaitable, possible, indispensable… L’objectif final est de partager la même vision. Et dans un troisième temps, les protagonistes doivent mettre au clair très tôt la répartition des rôles. Cela peut passer par la rédaction d’une charte par exemple, avec les droits et devoirs de chacun. La formalisation crée un engagement moral qui apaise les tensions. À condition, bien sûr, que tout le monde s’y retrouve.
Pour finir, il est également important, dans le cas d’une exploitation familiale, de poser l’option que le fils ou la fille ne voudra pas reprendre, et dédramatiser. Se sentir obliger de revenir, même inconsciemment, peut créer un mal-être. La clé avant de prendre sa décision est de se poser la question : « Pourquoi est-ce que je souhaite faire du vin ? » »

Propos recueillis Par Xavier Delbecque
Par Sylvie Brasquies, publié en novembre 2017
Tous droits réservés©

 

degustation thematique sitevi

Dégustation Spéciale Développement durable

Neoverticales évoquera le facteur humain dans le développement durable lors de la dégustation thématique organisée par le magazine VITI et les Vignerons en Développement Durable au SITEVI 2017 à Montpellier, sur le thème de la Responsabilité sociale d’entreprise (RSE).

le Jeudi 30 novembre à 11h30 sur le stand VITI (A001 hall d’accueil)

Le SITEVI célèbre ses 40 ans : c’est l’occasion de parler Durabilité et de RSE. L’atelier expert mon-Viti est dédié aux professionnels de la filière Vigne/vin.

Vous avez l’opportunité de prendre part aux défis du développement durable pour la filière en répondant à notre quiz Développement Durable.

QUIZ DD

Rendez-vous sur le stand VITI – Hall d’accueil A001

S'installer en viticuluture

S’installer en viticulture

Neoverticales participera à la conférence organisée par Vitisphère au SITEVI 2017 à Montpellier, sur le thème de l’installation, le Mercredi 29 novembre de 11h30 à 13h – Salle B.

Le désir de s’installer s’exprime fortement par l’envie d’assouvir une passion ou de poursuivre la réalisation familiale. Sylvie Brasquies apportera un éclairage sur le talent vigneron et les ressorts humains de la réussite.

S’installer en viticulture : connaissez-vous les risques et les facteurs clés de succès ?
« S’installer en viticulture : c’est le projet d’une vie et souvent la concrétisation d’une passion. Mais certains s’y cassent les dents. En compagnie de professionnels de l’immobiliers viticoles et d’experts comptables, juridiques, et des ressources humaines, la conférence balaiera les problèmes rencontrés et les moyens d’éviter les embûches. De quoi débuter le plus beau du monde avec toutes les clés en main ! »

Animateur: Marion Sipeau Ivaldi, rédactrice en chef de Vitisphère (Montpellier)
Intervenants: Sylvie Brasquies (Neoverticales), Me Eric Nahmé, Jurisvin, Michel Veyrier (Vinea Transaction)

conférence casser les codes

Casser les codes : comment réinventer son métier de vigneron?

Les 4  et 5 avril 2017,  Neoverticales était parmi les vignerons et professionnels de la filière vin dans l’Aude, à Narbonne pour parler d’un thème transversal et  fort : 

« Casser les codes… vision, ambition ou trahison ? ».

Deux jours durant, nous avons débattu et nous nous sommes interrrogés sur les questions suivantes :

Un vigneron peut-il décider de casser les codes habituellement utilisés pour le secteur du vin ?

Pour quoi faire ? Comment ? Et quelles sont les conséquences ?

Casser les codes, cela serait un peu l’éldorado du vigneron. Imaginons un instant que la solution vienne aussi des vignerons eux mêmes et de leur capacité à cultiver leurs talents…

Sylvie Brasquies apportera un éclairage sur  le talent vigneron et sur les pistes pour réinventer son métier de vigneron.

Retrouver les rencontres nationales des Vignerons Indépendants dans l’Aude – 2017, les circuits découverte et la soirée de gala :

https://www.vigneron-independant.com/rencontres-nationales-aude-2017

Télécharger le programme 2017 :

Programme Rencontres Aude 2017