Le vigneron aime par-dessus tout cette connexion avec la terre, ses vignes et son vin. C’est sa passion. Il lui arrive de « délaisser » la partie commercialisation, et de se priver d’une autre connexion toute aussi cruciale, la connexion avec les consommateurs.
Certains vignerons se sentent peu concernés par le « digital » : au-delà du manque de connaissance ou de temps pour ces nouveaux outils numériques, ils n’en perçoivent pas les opportunités pour leur métier de vigneron.
D’aucuns tentent leur première « expérience digitale » pour se rendre plus visibles pendant que d’autres ont déjà entrepris la recherche de nouveaux clients via les réseaux sociaux.
Savoir manipuler les outils numériques deviendra crucial pour développer son domaine
Les réseaux sociaux permettent, avec d’autres outils numériques (vente en ligne, plateformes d’achats groupés), de se rapprocher des consommateurs. C’est l’opportunité pour le vigneron de redonner sa dimension humaine à une transaction marchande et de « cultiver » son lien avec le consommateur. Le vigneron peut, à travers la description de son quotidien et de ses méthodes de travail, développer l’intérêt des consommateurs sur la façon dont le vin est produit, faire la promotion d’un label ou d’une certification qu’il a mis des années à obtenir… et surtout se différencier en exprimant sa vision et ses valeurs pour son vin. Les vignerons qui ont réussi à imposer leurs vins sur les marchés, ont entrepris cette conversion 2.01 auprès des consommateurs.
Les 5 points clés pour réussir sa conversion 2.0
1. Prendre conscience du profond changement dans les pratiques de consommation
2. Organiser son métier de vigneron pour répondre à ces nouvelles attentes
3. Se former aux nouvelles pratiques digitales
4. Expérimenter sa propre stratégie digitale
5. S’intéresser à ce que font les start-up du vin
1. Prendre conscience du profond changement dans les pratiques de consommation
Réduire le numérique à un ensemble d’outils qu’il faudrait maîtriser, conduirait à ignorer l’importance du changement en cours. Si le vigneron est déjà entré dans l’ère du numérique avec la viticulture de précision (GPS, capteurs et autres drones…), il lui faut désormais vendre du vin dans ‘’la civilisation numérique’’. . Et cela, c’est une autre histoire… Pour s’engager dans cette voie, il faut comprendre les nouvelles règles du jeu.
Le numérique n’est pas qu’un ensemble d’outils car il vient modifier les pratiques de consommation de vin
La probabilité que Parker connaisse mes gouts est très faible. En revanche, une application mobile comme Vivino va m’indiquer que 10 000 personnes ont aimé tel vin et la probabilité que ce vin me plaise devient plus importante.
Lorsqu’un consommateur vient « tweeter » à propos d’une dégustation ou d’un domaine, il permet à des consommateurs qui ne se trouvent pas à cet événement d’être informés, mais surtout de s’exprimer à ce sujet.
Pour gagner de nouveaux débouchés, il faudra gagner de nouveaux territoires, ceux du numérique.
Avec l’explosion des réseaux sociaux, le consommateur de vin a de nouveaux critères de décision pour acheter du vin. Ils utilisent davantage les recommandations de la masse de ses semblables qui ont déjà dégusté tel vin plutôt que de se référer à des experts. Le baromètre Gallo 2016 sur la consommation de vins des français indique que lors de l’acte d’achat, 58 % des consommateurs font d’abord un choix raisonné en s’appuyant sur l’avis de leur entourage. Chez les jeunes de 18-25 ans, cette tendance est encore plus marquée, à 67 %. Le numérique devient un outil majeur dans la construction de la relation avec le consommateur. Le vigneron devra être en mesure de communiquer sur les réseaux sociaux en même temps qu’il continuera à aller sur les Salons et à faire des concours pour promouvoir ses vins.
2- Organiser son métier de vigneron pour répondre à ces nouvelles attentes
Le vigneron doit se montrer pragmatique en matière de communication digitale pour intégrer cette activité dans la gestion quotidienne de son domaine viticole. Face au défi numérique, le vigneron doit être en mesure d’organiser cette nouvelle composante de son métier. Pour créer une page Facebook, un compte Twitter, une chaîne Youtube ou un blog, il peut développer ses propres connaissances, ou s’appuyer sur un expert externe en communication digitale, comme il le fait fréquemment avec un œnologue conseil ou un expert-comptable.
3- Se former aux nouvelles pratiques digitales
Auparavant, il fallait être un expert pour « s’exercer au digital ». Aujourd’hui, avec un smartphone et les réseaux sociaux, chaque vigneron devient un média, qui relaye des informations et des contenus. Pour réussir sa conversion 2.0, le vigneron doit néanmoins apprendre de nouveaux types de communication et analyser différemment ses données consommateurs. Pour y parvenir, il faut comprendre les nouveaux codes culturels propres au numérique et se former aux réseaux sociaux (via les chambres d’agriculture, les organisations professionnelles…).
Les 3 compétences numériques à acquérir pour le vigneron
1. Savoir travailler avec des « communautés d’internautes » : consulter leur avis, partager des informations pratiques, etc. Passer d’une logique de « fichier » ou de « base clients » à une logique de « partage et d’échange » via les réseaux sociaux.
2. Savoir générer du contenu numérique auprès des différents réseaux sociaux, en cohérence avec ses valeurs et la vision que l’on a pour son domaine et pour ses vins.
3. Être capable d’étudier les nouvelles possibilités offertes par le numérique dans ses choix de distribution et de développement.
4- Expérimenter sa propre stratégie digitale
Comme dans les vignes, le vigneron a la possibilité avec les réseaux sociaux d’expérimenter de nouvelles façons de faire. De la même façon, le vigneron se retrouve sur les réseaux sociaux avec des paramètres qu’il peut contrôler et d’autres qui ne dépendent pas de lui. L’expérimentation est encore le meilleur moyen d’avancer. Chaque vigneron a largement de quoi alimenter son site Internet, sa chaîne Youtube ou son compte Linkedin, en parlant de son domaine, en montrant son terroir, les beaux gestes à la vigne et dans les chais, en racontant des temps forts pour faire son vin, en évoquant ses médailles… Il doit ensuite diffuser ces informations multimédia via Twitter et Facebook et échanger directement avec les internautes, les encourager à venir visiter son domaine, leur permettre de commenter ses propres contenus et d’en publier eux-mêmes… Enfin, il est important d’organiser une alerte Google pour identifier les flux où on est mentionné… et de mesurer les résultats obtenus!
Dans l’ère du numérique, le consommateur devient partie prenante de la chaîne de valeur : tester et apprendre avec ses clients permet de repérer les bonnes communautés sur les réseaux sociaux, dans un esprit de collaboration, à condition de bien comprendre le positionnement de chaque réseau, dont voici un exemple :
5- S’intéresser à ce que font les start-up du vin
Les starts-up du vin produisent les outils et les services de demain. Vivino, Goot, Wine Advisor, Geovina, Vinexplore… proposent des appli mobiles pour les amateurs de vin. Les Grappes, Trocwine, Vinoga, Winerepublik, Wine tour booking… sont autant de nouvelles plateformes Web d’achats groupés ou d’échanges…
Les start-up du vin savent repérer des communautés. Elles ont analysé et imaginé de nouveaux usages pour les consommateurs, l’achat, le service, etc. Elles privilégient les usages aux processus. Comment on consomme du vin aujourd’hui ? C’est ce qui les rend complémentaires des vignerons. Ces start-up pensent de nouveaux usages que permet le numérique : les applications mobiles, la géolocalisation, la plateforme, les recommandations, etc. pour mieux développer les ventes de vin. Coté vigneron, ces solutions permettent donc un gain de temps pour toucher de nouveaux clients.
Hier, le vigneron pouvait réussir avec les seuls circuits traditionnels. Demain, il pourra s’appuyer sur des partenariats avec des start-up, qui trouveront de nouveaux usages et donc de nouveaux débouchés pour les vignerons. Ces derniers ont tout intérêt à effectuer une veille sur les innovations produites par ces Start up du vin.
Le vigneron a parfois une certaine défiance vis-à-vis des outils numériques. Des freins qui reposent soit sur la méconnaissance des outils ou sur leur retour sur investissement au regard du temps consacré.
Pour lever ces freins, le vigneron doit adopter une nouvelle posture : s’ouvrir au changement et entreprendre de nouvelles activités grâce à ces outils numériques. La communication digitale permet de réinventer une forme de proximité avec ceux qui aiment son vin. C’est encore par le chemin de l’expérimentation que le vigneron parviendra à gagner de nouveaux territoires, ceux du numérique.
Par Sylvie Brasquies, publié le 04 Octobre 2016
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